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Allocution du président de Pas à Pas

Chers ami(e)s, nous sommes heureux de vous accueillir à Saint Martin d’Hères, au cœur d’un quartier trop souvent montré du doigt pour son insécurité. Nous aurons l’occasion de montrer dans cette intervention en quoi nous sommes opposés à ce type de discours et en quoi ce type de discours sécuritaire ne permet pas de réguler les problèmes sociaux, bien au contraire.

Mais avant tout, nous tenons à remercier tous ceux et celles qui ont aidé à la réussite de cette journée, avec les faibles moyens que nous avons, et aussi compte tenu du fait que la mairie de SMH n’a même pas été capable de tracer les lignes du terrain de foot. Nous remercions les associations venues présenter leur travail et je vous encourage à aller à leur rencontre afin de mieux les connaître. En espérant que l’année prochaine prenne la forme d’un forum des associations qui travaillent sur le champ social. Nous remercions aussi les élus venus écouter et prendre conscience de l’émergence d’une voix populaire. Nous saluons cette démarche, et l’encourageons. Nous serons avec tous ceux qui veulent faire avancer le débat. Il faut préciser que quand la France d’en bas s’exprime, la France d’en haut n’est pas souvent au rendez vous pour prendre en compte les réalités et les spécificités, ou bien alors on nous fait passer pour des agitateurs ou des éternels « jeunes de quartiers ». Avant de parler de l’avenir et de nos perspectives, il faut revenir sur le passé et essayer pour comprendre sur quoi est basé notre engagement associatif.

1er constat :

Traditionnelle terre d’accueil, la France n’a cessé, depuis 1974, de développer un "discours anti-immigré. On l’a vu matérialisé par l’électorat d’extrême droite que la gauche a fabriqué ; Et On l’a vu aussi avec les politiques et les discours sécuritaires de Pasqua à Sarkozy. La gauche elle-même n’a pas redoré le blason.

2ème constat :

Une politique d’intégration qui a ajouté la discrimination sociale à la relégation spatiale, la ghettoïsation et qui n’a pas réussi à clarifier les processus d’identification. Il y a des français qui ne sont français quez sur les papiers. Et encore quand ils les obtiennent.
Alors qu’en est il de la réalité de nos villes et de nos quartiers ?

- Les populations issues de l’immigration des années 60 et 70 auraient dû prendre leur place dans la société, mais se sont retrouvé enfermées dans des ghettos avec la tentation du repli communautariste en guise de protection face à cette marginalisation.

- Les nouveaux arrivants se sont installés dans ce contexte de ghettoïsation et les difficultés sociales se sont accumulées. Le processus d’intégration est devenu chaotique et plus difficile. L’absence de politique menée contre les ghettos, et l’absence d’organisation de l’immigration ont dégradé la situation sur le terrain, laissant penser que faute d’intégration réussie il faudrait peut etre stopper l’immigration. L’existence sociale et politique de cette population est hasardeuse et n’offre pas de perspectives claires et rassurantes. La discrimination positive n’est qu une manière d’accepter un état de fait, la discrimination, mais pas de changer les consciences. Aujourd’hui l’actualité médiatique est dominée par la rhétorique de la peur, de la menace de l’insécurité et de la république en danger (surtout en période électorale), ou de l’incompatibilité des identité. Qu’elle soit ciblée sur les sauvageons, les délinquants, les voyous, les dangers des tournantes ou bien sur les intégristes, fondamentalistes, antisémites, ces informations n’ont de poids que par leur répétition à outrance qui empêche de developper un esprit critique. Comme si ces affirmations avaient prouvé ou expliqué quoi que ce soit. Les medias et les politiques présentent toujours les quartiers populaires comme des territoires à reconquérir, des lieux de décomposition sociale. Le discours sécuritaires, identitaires qui étaient l’apanage de l’extrême droite sont maintenant repris par le droite et aussi par la gauche qui se prétend socialiste, ainsi que par l’extrême gauche. En témoignent les rapports de malek boutih sur l’immigration et de bénisti sur les langues maternelles. Tous ces discours pour cacher l’échec L’échec des politiques de la ville qui depuis trente ans n’ont pas réussi à faire revenir le taux de chômage des quartiers vers la moyenne nationale. L’échec des politiques de la ville qui ont fabriqué les écoles à deux vitesses, les lieux de marginalisation sociales et qui ne répondent plus aux exigences d’une société de plus en plus libérale. L’échec des politiques de la ville qui en terme de logement perpétuent un système communautarisant. Chômage, petits boulots, rmi, précarisation, exclusions, violences : une réalité à laquelles peu d’acteurs politiques sont à l’écoute. Les différents ministres de l’intérieur n’ont fait qu’analyser les quartiers sous le regard sécuritaires. Le fond du problème est que cette population et sa jeunesse se sent ignorée, rejetée. Il y a eu des politiques délibérées de regroupement ethnique organisées par les offices HLM. Certains quartiers, à Grenoble, ne sont plus habités que par des populations d’origine immigrée, littéralement assignées à résidence, où règnent l’échec scolaire, le chômage, la délinquance et la drogue. Les partis politiques ont maintenu la deuxième génération dans un rôle de figuration, ni français, ni arabe, des beurs, voir même des "beur de service".

Alors quelle alternative ? L’objectif est de reconquérir sa place dans la société.

  1. En premier lieu, retrouver une identité citoyenne française par la compréhension et la réappropriation de l’histoire. D’un autre coté, il est important que l’état fasse aussi ce travail de mémoire et le répercute dans les manuels scolaires et dans les administrations.
  1. Ensuite, construire une identité politique qui permettra de se réapproprier la parole, une parole populaire authentique à laquelle les politiciens devront être attentifs. Cette parole permettra à la fois d’exprimer ce que nous sommes réellement, et ce que nous voulons, mais aussi d’élaborer des perspectives à moyens et longs termes pour des couches populaires en panne de projet social.

Conclusion

Pour toutes ces raisons, Pas à Pas s’engage dans la vie politique de la ville de Saint Martin d’Hères pour défendre les valeurs fondamentales de notre république et défendre les principes de justice sociale auxquels nous tenons. Pas à Pas travaillera donc afin de proposer une liste électorale indépendante pour les élections municipales de 2008 afin de promouvoir une résistance citoyenne libre.

P.-S.

Discours tenu lors de notre journée du 18 juin, Résiste ! à St Martin d’Hères.